mai 012016
• « Gros Plan » sur Tournesol par Anne Yven dans Jazz Magazine (mai 2016)
Tournesol
Les jeux de l’écoute
Nouvelle sortie du label Dark Tree ce printemps, Tournesol est un projet qui réunit Julien Desprez, Benjamin Duboc et Julien Loutelier, trois créateurs d’un jazz qui se fiche bien de la langue et ses barrières et lui préfère l’oxymore et sa poétique.
Inutile de se pencher, cette musique vient à nous depuis le sol où se sont trouvés trois compositeurs, autour d’une envie de symbiose. Julien Desprez, dont on connaît les qualités d’explorateur sonique à la guitare électrique, Benjamin Duboc, contrebassiste pivot de fusions musicales hexagonales et internationales, et Julien Loutelier aux percussions, dernière pièce qui rapporte que « ce premier disque est une sorte d’OVNI. Un jardin que l’on cultive en prenant le temps ». Un conseil précieux avant l’écoute : préférer à l’accoutrement de jardinier celui de plongeur excavateur. Au delà du grand bleu, c’est en eaux profondes que l’on part trouver les sons pour les livrer à la lumière. Les guitares de Desprez sont pour Loutelier un stimulant : « J’essaie ensuite de me placer comme un brouilleur de pistes, avec des sons acoustiques qui pourraient sonner électroniques, des résonances qui ajoutent de l’air à la manière d’une pédale de réverb’, ou des aigus qui façonnent le haut du spectre. Benjamin, lui, propose une profondeur, une clarté, avec de beaux graves qui lui sont propres ».
Haute et basse à la fois, la musique s’échafaude en quatre paliers-titres. « Le titre du disque, « Pour que la nuit s’ouvre », précise Duboc, est une phrase que j’ai lue dans l’ouvrage Sortir du noir de Georges Didi Huberman » [dédié au réalisateur du film Le Fils de Saul, primé récemment à Cannes, NDR]. Mais si l’auteur évoque le fait de trouver la lumière et la vie dans un contexte sombre, la musique du disque ne prend pas sa source dans d’obscures thématiques, elle jaillit sans but. « Le disque n’est pas narratif, assure Loutelier. Il ne va pas d’un point vers un autre, mais présente des instants de jeu, sans réel début ni fin ». Benjamin Duboc relate que Tournesol est sorti de terre il y a quelques années. « Nous jouions ensemble, Julien Desprez et moi, et le besoin d’un percussionniste s’est fait sentir. Julien Loutelier, croisé sur un projet avec le saxophoniste Abdelhai Bennani – un ami et un musicien irremplaçable, précise-t-il – avait exactement ce que l’on cherchait. Un jeu qui se construit par frottements de matières, par continuité plus que par battements. C’est primordial à l’élaboration d’un son qui progresse en tenant compte des plus infimes modulations de l’autre. C’est précisément de ces micro-vibrations que naît la musique. En évitant l’écueil de l’imitation, la perte d’identité, chacun de nous doit à la fois rester lui-même, autonome, et dans un état de constante absorption. Nous jouons à nous écouter ». Est-ce musique ou matière sonore ? « J’aime que cette musique non-instrumentale soit créée à partir d’une instrumentation classique guitare/basse/batterie. A chaque instant la situation de jeu est inédite. Elle nous donne l’impression d’être au cœur d’une sphère lumineuse que l’on colorise à trois en permanence. Nous souhaitons donner l’impression que le son jaillit d’une seule source et non de trois ».
Quant au nom du trio, Tournesol, Benjamin Duboc lui offre ce beau concept de « phonosynthèse » : « L’attention extrême portée au son de l’autre. De la même façon que la plante porte une attention vitale au soleil, cette altérité qui la nourrit ». Loutelier, lui, y voit « la chaleur, la lumière vive. Le tournesol représente aussi le plaisir que je ressens à jouer avec eux ! ». Dites-le avec des fleurs.
Les jeux de l’écoute
Nouvelle sortie du label Dark Tree ce printemps, Tournesol est un projet qui réunit Julien Desprez, Benjamin Duboc et Julien Loutelier, trois créateurs d’un jazz qui se fiche bien de la langue et ses barrières et lui préfère l’oxymore et sa poétique.
Inutile de se pencher, cette musique vient à nous depuis le sol où se sont trouvés trois compositeurs, autour d’une envie de symbiose. Julien Desprez, dont on connaît les qualités d’explorateur sonique à la guitare électrique, Benjamin Duboc, contrebassiste pivot de fusions musicales hexagonales et internationales, et Julien Loutelier aux percussions, dernière pièce qui rapporte que « ce premier disque est une sorte d’OVNI. Un jardin que l’on cultive en prenant le temps ». Un conseil précieux avant l’écoute : préférer à l’accoutrement de jardinier celui de plongeur excavateur. Au delà du grand bleu, c’est en eaux profondes que l’on part trouver les sons pour les livrer à la lumière. Les guitares de Desprez sont pour Loutelier un stimulant : « J’essaie ensuite de me placer comme un brouilleur de pistes, avec des sons acoustiques qui pourraient sonner électroniques, des résonances qui ajoutent de l’air à la manière d’une pédale de réverb’, ou des aigus qui façonnent le haut du spectre. Benjamin, lui, propose une profondeur, une clarté, avec de beaux graves qui lui sont propres ».
Haute et basse à la fois, la musique s’échafaude en quatre paliers-titres. « Le titre du disque, « Pour que la nuit s’ouvre », précise Duboc, est une phrase que j’ai lue dans l’ouvrage Sortir du noir de Georges Didi Huberman » [dédié au réalisateur du film Le Fils de Saul, primé récemment à Cannes, NDR]. Mais si l’auteur évoque le fait de trouver la lumière et la vie dans un contexte sombre, la musique du disque ne prend pas sa source dans d’obscures thématiques, elle jaillit sans but. « Le disque n’est pas narratif, assure Loutelier. Il ne va pas d’un point vers un autre, mais présente des instants de jeu, sans réel début ni fin ». Benjamin Duboc relate que Tournesol est sorti de terre il y a quelques années. « Nous jouions ensemble, Julien Desprez et moi, et le besoin d’un percussionniste s’est fait sentir. Julien Loutelier, croisé sur un projet avec le saxophoniste Abdelhai Bennani – un ami et un musicien irremplaçable, précise-t-il – avait exactement ce que l’on cherchait. Un jeu qui se construit par frottements de matières, par continuité plus que par battements. C’est primordial à l’élaboration d’un son qui progresse en tenant compte des plus infimes modulations de l’autre. C’est précisément de ces micro-vibrations que naît la musique. En évitant l’écueil de l’imitation, la perte d’identité, chacun de nous doit à la fois rester lui-même, autonome, et dans un état de constante absorption. Nous jouons à nous écouter ». Est-ce musique ou matière sonore ? « J’aime que cette musique non-instrumentale soit créée à partir d’une instrumentation classique guitare/basse/batterie. A chaque instant la situation de jeu est inédite. Elle nous donne l’impression d’être au cœur d’une sphère lumineuse que l’on colorise à trois en permanence. Nous souhaitons donner l’impression que le son jaillit d’une seule source et non de trois ».
Quant au nom du trio, Tournesol, Benjamin Duboc lui offre ce beau concept de « phonosynthèse » : « L’attention extrême portée au son de l’autre. De la même façon que la plante porte une attention vitale au soleil, cette altérité qui la nourrit ». Loutelier, lui, y voit « la chaleur, la lumière vive. Le tournesol représente aussi le plaisir que je ressens à jouer avec eux ! ». Dites-le avec des fleurs.
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