• Jean-Michel Van Schouwburg // Orynx (22 août 2022)
Le label Dark Tree documente systématiquement des enregistrements d’archives du pianiste Horace Tapscott et du tandem John Carter et Bobby Bradford, mais aussi Robert Miranda et Vinny Golia. Après avoir publié deux enregistrements avec des groupes plus larges (comme Horace Tapscott with the Pan Afrikan Peoples Arkestra and the Great Voice Of UGMAA – Why Don’t You Listen? DT (RS) 11), voici que Dark Tree propose un excellent quintet qui a très souvent joué à Los Angeles. Excellemment capté dans le légendaire Catalina’s Bar and Grill, Cahuenga Blvd à L.A., un lieu qui accueillit régulièrement des concerts de Christian McBride, David Sanchez, Buddy Colette, John Scofield, etc … , le quintet de Tapscott réunit son groupe régulier. Le saxophoniste Michael Sessions, le tromboniste Thurman Green, le contrebassiste Roberto Miranda et le batteur Fritz Wise entourent le leader dans une formation soudée, puissante et cohérente autour des compositions bien charpentées du leader et un Motherless Child chanté par Dwight Trible, lequel chante aussi dans Close To Freedom et Little Africa dans une manière nourrie de la tradition du gospel. C’est donc de l’excellent jazz moderne avec une sérieuse pointe de Coltrane imprégnée de blues dans le chef du saxophoniste Michael Sessions. S’il tient les cadences rythmiques avec une fermeté implacable mais swinguante, Fritz Wise a le don de se mettre en orbite lorsque Sessions prend un solo de sax ténor passionné dans Breakfast at Bongo’s. Plusieurs morceaux dépassent la marque des douze minutes en raison des solos individuels mais les arrangements sinueux et dynamiques sont exécutés au cordeau. Très remarquables interventions du leader au piano, un styliste vraiment original au feeling proche d’un Jaki Byard. Il joue « presque » free à la limite du swing avec une belle manière percussive. Le contrebassiste a un jeu idéal et fait complètement corps avec la musique du pianiste. Dans les trois derniers morceaux, le groupe se focalise sur l’efficacité en resserrant l’interprétation de Close to Freedom (8:24), The Theme (5:36) ) et Little Africa (8 :58), mettant en valeur la construction des compositions de Tapscott et ses improvisations folles mais calibrées au piano. The Theme, justement : signé Miles Davis et morceau final des sets du trompettiste dans les années 50, c’est l’occasion d’un chassé-croisé entre le pianiste et le batteur. Le final, Little Africa est laissé pour la bonne bouche, une synthèse – comprimé de ce que ce quintet a à nous offrir, avec la magnifique et survoltée partie vocale de Dwight Trible qui en transcende toute l’essence. Tapscott étant un vétéran, il est fort à parier que si cette musique avait pu être jouée et enregistrée pour Blue Note dans les années soixante, cet album live serait aujourd’hui une véritable référence. Leur message musical s’adresse avant tout à la communauté afro-américaine, fortement représentée dans le public de cette soirée plutôt qu’aux critiques de jazz ou aux afficionados branchés. Pianiste singulier, Horace Tapscott fait partie de ce lignage de pianistes uniques du jazz moderne comme Herbie Nicols, Sal Mosca, Randy Weston, Jaki Byard et Burton Greene. Donc, un superbe album d’une musique ressentie et vécue par un vrai groupe régulier de la Great Black Music la plus authentique.
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